12 octobre 2007

La java des chaussettes

(à Névrosia, agente secrète en mission)

Lorsque vient le soir et que chacun dort
Chaussettes de céans invitent leurs copines
De toutes les maisons voisines
Et les font entrer par le corridor

L’on papote l’on converse
Comme vous pensez bien l’assemblée est diverse
Venant du quartier zupé
Comme du manoir huppé

Chaussettes de tennis chaussettes d’apparat
Chaussettes à clous pour arrêter les malfrats
Chaussettes de sport pour permettre aux scélérats
D’accélérer chaussettes pour
Macho balourd
Chaussettes de galant timi-
De avec des petits cœurs pour figurer l’amour

On ne sait plus trop qui est qui ici
Mais honni soit quiconque s’en soucie

Près de l’armoire à pharmacie
La socquette d'un garnement
S’afflige d'un gros trou à la place du pouce
Un grand bas dit d'une voix douce
Nous allons sur ce trou placer un pansement

L'horrible solution de continuité(*)
Etant de ce fait réparée
L'enfant-chaussette alors plein de sérénité
S'en va bercer sa chaussette-poupée
D’une enfantine mélopée

Qu’il est excitant d’être là
À se verser des coups à boire
En écoutant « Ô Daniela »
Joué par les Chaussettes Noires

Et lorsque minuit sonne à l'horloge normande
L'heure est enfin venue de copuler avec ardeur
Observateur zélé ici l’on te demande
De respecter plein de tact leur pudeur
La vie amoureuse de nos chaussettes
Doit être abordée avec des pincettes

Au petit matin c’est fini la fête
D’un seul coup d’un seul l’orchestre s’arrête
On laisse tout en chantier
Quand c’est l’heure du laitier

Et voici les chaussettes
Sur le point de partir sans tambours ni trompettes

Hélas trop fatigués sans doute
Nombre de noceurs ont omis
De prendre incontinent la route
Pour retourner en leurs logis

Il en reste plein sur le carrelage
Et sur la moquette et sur le parquet
Et sur le tapis et le canapé
À s’entasser là bouchant le passage

La ménagère au lever dit coquin de sort
Pufichtre mais d’où donc est-ce
Que ça sort
Ça débor-
De au-delà de la caisse

Et c’est toujours autant et même plus qu’assez
Qu’il faut laver faire sécher et repasser
J’en ai déjà le dos cassé
Et le moral tout cabossé

Dans le voisinage autre son de cloche
Pas plus de chaussette ici que de beurre en broche
Un dessinateur aurait-il tout effacé
À grands coups d’une gomme extraite de sa poche
Il ne s’en trouve plus nulle part et c’est moche

C'est pourquoi l'on a lancé
La mode de s’en passer.


(*) un grand merci à Jean de la Fontaine (Contes)

(fragments de La Chaussettiade, épopée à venir, en vingt-quatre chants)

.

2 commentaires:

Névrosia a dit…

Merci beaucoup ! Je suis très touchée que tu penses ainsi à moi !
Je suis toujours très impressionnée par ton talent...ton cerveau est-il fait comme les nôtres ???

Tili a dit…

Ahhhhh les chaussettes ;-